jeudi 18 avril 2013

Café Müller, la plainte du corps

Café Müller

Pina Bausch



« Une plainte d'amour. Se souvenir, se mouvoir, se toucher. Adopter des attitudes. Se dévêtir, se faire face, déraper sur le corps de l'Autre. Chercher ce qui est perdu, la proximité. Ne savoir que faire pour se plaire. Courir vers les murs, s'y jeter, s'y heurter. S'effondrer et se relever. Reproduire ce qu'on a vu. S'en tenir à des modèles. Vouloir devenir un. Etre dépris. S'enlacer. He is gone. Avec les yeux fermés. Aller l'un vers l'autre. Se sentir. Danser. Vouloir blesser. Protéger. Mettre de côté les obstacles. Donner aux gens de l'espace. Aimer. »


Association d'idées (Raimund Hoghe)

       
 Dans ce café sombre ponctué de chaises vides, l'atmosphère est tendue. Deux corps fantomatiques (les danseuses Pina Bausch et Malou Airaudo) se meuvent telles des spectres, et se heurtent, à des objets, à des hommes. Il y a l'attente pour l'une, dont la silhouette se détache dans le fond du café. Celle-ci semble être le double effacé de la première danseuse, qui de son côté marche à l'aveugle, luttant contre ses souvenirs, recherchant le contact de l'être aimé, doux ou violent, passionné. Et soudain, la fuite, vaine, de l'espace de la scène, espace emprisonnant.



« L'espace a une limite : le périmètre d'une prison. Le corps a une limite : son éternel désir de contact et d'amour. » Lenonetta Bentivoglio



        Il y a d'autres personnages, parfois brisant les étreintes du couple, parfois protégeant les pas et élancées des danseurs, attentifs à tous leurs gestes. Et puis il y a cette mystérieuse femme rousse, un peu à l'écart de cette sorte de rêve passionné qui est train de se dérouler devant ses yeux. Il y a de l'empressement dans ses pas, de la crainte, de l'incompréhension, mais aussi du désir, celui de faire partie de tout ce qui se passe devant elle.


       Cette "pièce de théâtre dansée" se vit, ce sont nos propres sentiments à sa vue qui sont les clefs de ce qu'elle tend à exprimer. Elle remue, étonne captive, et nous touche plus profondément que nous ne l'aurions pensé. Elle nous offre une grâce immense tout en véhiculant une profonde mélancolie, en touchant à des thèmes tels que l'incommunicabilité, la souffrance de la rupture amoureuse, l'absence et la solitude. Les mots d'Hervé Guibert, journaliste au Monde, réussissent très justement selon moi à retranscrire la grandeur du Café Müller par Pina Bausch.




       « Est-ce que j'aime assez, et est-ce que j'aime « bien », est-ce que je ne passe pas à côté d'occasions d'amour, et est-ce que je ne suis pas en train de les détruire dès que je les saisis ? Dans toutes ces questions, qui sont le lot du commun, la note la plus vibrante est donnée, en trois quarts d'heure, et sur la seule musique d'un violoncelle, dans Café Müller. La mémoire a conservé peu de choses de ce spectacle, sinon la certitude de quelque chose qu'on se doit de dire, et qui là est dit, une fois pour toutes, mieux que jamais, et si rapidement, si purement , qu'on en tremble, qu'on en a la parole coupée, et qu'on sort le cœur blessé et pansé, baigné d'une effluve de larmes. Ce n'est pas Pina Bausch qui nous blesse le cœur, il était déjà blessé, seulement cette blessure était tombée dans l'oubli, on s'était employé à nous la faire oublier, à la faire passer pour futile, romantique, narcissique, et Pina Bausch, par l'intermédiaire du corps de ses danseurs, nous rappelle à la réalité, à la vitalité de cette blessure. Elle ne nous en tend pas le miroir, ou l'illustration, mais une sorte de radiographie cinglante qu'elle accompagne en même temps d'émollients, d'une trousse de secours pour brûlés au second degré. »


L'Accent sur....

Le Corps. Pour le thème de ce mois (et demi) ci, changemenent radical de sujet. Nous nous tournons vers un "objet" beaucoup plus concret, que chacun possède.
Le corps : il est modèle pour le peintre, il devient personnage de roman, il s'anime au son d'une musique, il est l'outil de travail du danseur, il joue sur les planches ou derrière la caméra. Il est multiple, toujours différent et unique d'un être à l'autre. C'est peut être pour ça que les artistes l'on autant utilisé, fait joué, peint, photographié, habillé et plus encore...  Qu'on l'aime ou qu'on le déteste, le corps ne laisse jamais indifférent et ce mois ci, à l'aube de l'été où le corps redevient visible, Kulturrama a envie de vous le faire (re)découvrir. On espère qu'il va vous étonner...


Et parce que je n'aime pas vous laissez sur votre faim, je vous laisse ces deux petites vidéos pour vous offrir déjà un aperçu de ce qu'il peut faire de génial...




dimanche 14 avril 2013

L'Image : de Caspar Friedrich


1810, Caspar Friedrich, Abbaye dans une forêt de chênes (The Abbey in the Oakwood)


Paysage ouvert et désolé, ruines, couleurs toutes en nuances, atmosphères brumeuses, ce tableau est emblématique de l'oeuvre de Friedrich, lui même emblématique de la peinture romantique allemande du XIXème siècle.

"Vestiges d'une abbaye dans ce qui fut une forêt" serait un titre plus évocateur. Avec cette vie qui s'éteint et la puissance de la nature qui recouvre celle de l'homme, l'apocalypse n'est pas loin. Les frontières indistinctes ne laissent présager que des ténèbres, la lumière qui n'arrive pas à atteindre le sol traduit une lourdeur de l'air quasi-maléfique. Le ciel aux couleurs indéfinies renvoie à un autre monde, à un temps qui n'est pas le nôtre 

ou qui ne l'est plus.

L'Image clôt le thème Apocalypse.

jeudi 11 avril 2013

RAGE - Dans la famille post-apocalyptique : le jeu vidéo



Jeu sorti en 2011, Rage est un FPS (First Person Shooting) qui a renouvelé le genre, bien que passé relativement inaperçu à côté des grandes productions qui sortaient au même moment (notamment Battlefield 3).

Dans ce jeu, la Terre est devenue une sorte de western géant et futuriste, où les survivants sont réunis dans des villes miséreuses. Un gouvernement veille, mais ce sont plutôt les très nombreux bandits qui font la loi, ainsi que des mutants très dangereux sortis d'on ne sait où.
Vous, vous incarnez un humain très particulier puisque équipé d'un défibrillateur branché directement sur votre cœur, vous rendant beaucoup plus coriace. Mais aussi, inexplicablement, la cible de toutes les recherches du gouvernement.

L'ambiance de ce jeu vidéo est sont point fort incontestable. Le mélange de futuriste et de western est très réussi, et bien que le choix des armes soit très grand, vous opterez de plus en plus pour une arme bien plus archaïque mais beaucoup plus meurtrière que les autres : le wingsticks, un boomerang possédant trois branches aiguisées.
Rage peut séduire un public plus large que les gamers FPS, puisque son univers est très vaste et offre de multiples possibilités. Quêtes annexes, cartes dissimulées (jouables dans les bars, vraiment très sympa), courses explosives d'engins trafiqués, découverte de zones surprenantes, chutes de météorites, show de mutants...



Les 10 heures initiales du jeu peuvent être doublées voire triplées, sans se lasser des personnages rencontrés et des missions proposées, rivalisant entre elles de surprises, de frissons et d'action.

Bémol que je me dois de signaler : la fin. Elle laisse vraiment pantois, pas qu'elle soit mauvaise, mais... "radine". Je suis tombée par hasard sur un classement de jeuxvideo.com qui la signale comme la deuxième fin la plus décevante de tous les jeux vidéos.

C'est dommage, mais le jeu se recommence quand même avec beaucoup d'envie. Surtout qu'il existe quatre modes de difficulté : Facile (pour les débutants du FPS), Normal (les ennemis sont moins bêtes que dans la plupart des jeux vidéos), Difficile (les ennemis sont aussi malins et coriaces que vous, voire plus), Cauchemar (référez-vous à son nom, il est parfaitement évocateur).

Je conseille ce jeu à tous ceux qui sont découragés par le FPS en voyant les fous furieux de Call Of Duty ou Battlefield, il n'existe pas que ça ! Rage propose de l'action intelligente et une expérience de jeu très immersive. Alors maintenant, bon jeu !


Et on se retrouve bientôt, pour les survivants...